HISTOIRE MÉCONNUE : Slavoutytch, une ville née de la catastrophe de Tchernobyl
Tchernobyl, Prypiat… Quand on parle de la catastrophe de Tchernobyl, on parle surtout de ces villes-là, devenues fantômes. Si ces villes ont été désertées, saviez-vous qu’une autre a été spécialement créée pour accueillir les réfugiés ?
Imaginez-vous devoir tout abandonner du jour au lendemain : maison, vêtements, objets et mêmes animaux de compagnie, persuadés que cela reste temporaire. Imaginez-vous être brutalement abrité dans un logement en vous persuadant que cela durera quelques jours, quelques semaines ou, tout au plus, quelques mois, alors que vous allez y passer en réalité toute votre vie. C’est ce qui s’est passé pour 250 000 personnes, dont l’espoir de rentrer chez eux fut illusoire.
Un peu d’histoire
Le 26 avril 1986, le réacteur numéro 4 de la centrale nucléaire de Tchernobyl explose et libère d’importantes quantités d’éléments radioactifs dans l’atmosphère. Les irradiations et contaminations entraînent la mort de nombreuses personnes et en rendent d’autres gravement malades. Les conséquences sanitaires sont désastreuses, à tel point que la catastrophe devient le plus grave accident nucléaire du XXe siècle et surpasse, selon l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN), celui de Fukushima de 2011. Plus de 250 000 personnes originaires de Biélorussie, de Russie et d’Ukraine sont alors évacuées dans les jours et semaines suivant l’accident. Parmi eux, plus de 49 000 habitants de Prypiat ou encore 17 000 habitants de Tchernobyl, qui sont informés de la situation sur le tard et à qui on promet de revenir dans les deux ou trois jours suivants. Ils ne le savent pas encore, mais ils ne reviendront jamais vivre dans leurs maisons.
Une ville construite dans l’urgence
Où reloger autant de monde aussi rapidement ? C’est une question que les autorités se posent. Si certains sont envoyés dans la région de Polesskoïe, d’autres sont relogés à Vilcha, petit village dans l’oblast de Kiev, qui s’appelle désormais le « Vieux Vilcha », maintenant qu’il a été rasé, avant d’être envoyés dans le « Nouveau Vilcha », ou Vilcha 2. Mais cela ne suffit pas : le gouvernement soviétique décide de construire une autre ville destinée à accueillir les exilés : Slavoutytch. Située à 30 kilomètres de la centrale et à 48 kilomètres de Prypiat, elle a été construite en un temps record pour devenir habitable en octobre 1988.
8 districts pour 8 architectures différentes
Pour que cela soit possible, le gouvernement a fait appel à des architectes et ouvriers de huit républiques soviétiques (Ukraine, Russie, Estonie, Lettonie, Géorgie, Lituanie, et Azerbaïdjan), ce qui explique la division en huit districts, nommés d’après les capitales de ces républiques. Conçue pour être « une ville du XXIe siècle », elle devient alors la nouvelle Prypiat. Son sol a été recouvert d’une couche de deux mètres de terre non contaminée. Aujourd’hui habitée par 25 000 personnes (contre 11 300 en 1989), elle est composée de huit garderies, de piscines, d’un centre de communications, d’un hôtel de ville, de centres sportifs, d’hôtels, de cliniques modernes, ainsi que d’une gare ferroviaire grâce à laquelle les ouvriers pouvaient se rendre à la centrale. Très vaste, elle comporte de nombreux immeubles et est fortement bétonnée.
Un avenir incertain
Pendant 20 ans, la ville qui se veut dynamique attire les jeunes à la recherche d’un bel avenir. Malheureusement, aujourd’hui, son avenir reste incertain. Les conséquences de cette construction rapide commencent à se faire ressentir : certains bâtiments, non entretenus (faute de moyens nécessaires), commencent à tomber en ruine… Économiquement parlant, la ville la plus jeune d’Ukraine doit faire face à d’importants problèmes. Alors que 9000 personnes travaillaient dans la centrale, la fermeture définitive de celle-ci en 2000 a réduit le nombre d’employés à environ 3000.
Même 30 ans après, le destin de Slavoutytch reste lié à Tchernobyl.
Sources :
https://www.stephanebouillet.com/nostalgic-poppet-slavoutytch
Pour en savoir plus sur l’accident nucléaire de Tchernobyl
Série : TCHERNOBYL, HBO, 5 épisodes.
Rédigé par : Marion Poulle