Ces erreurs d’expression que l’on fait tout le temps

La langue française est l’une des plus difficiles à apprendre. En cause : sa grammaire, sa conjugaison, ses accords, sa prononciation et son orthographe parfois rigoureux et pas forcément toujours logiques, avouons-le. Pourquoi prononce-t-on le « f » de « bœuf » au singulier mais pas au pluriel ? Pourquoi certains mots masculins comme « musée », « trophée » ou « lycée » s’écrivent-ils comme au féminin, avec « ée » ? Pourquoi le mot « Amour » est-il masculin au singulier (un amour passionné) et féminin au pluriel (des amours passionnées) ?

Bref, il n’est pas étonnant que même les personnes d’origine francophone se trompent. Alors, quand les expressions s’en mêlent, on ne s’en sort plus ! Nombreux d’entre nous se trompent régulièrement sur l’usage de certaines expressions. Si, à l’oral, l’erreur ne s’entend pas forcément, elle concerne bien souvent l’orthographe ou la signification.

Voilà quelques erreurs d’expression que l’on fait tout le temps.

  • On n’écrit pas « Autant pour moi » mais « au temps pour moi ». 

Peu importe la façon dont on l’écrit, la signification de cette expression est identique : on l’utilise pour reconnaître une erreur de sa part. Mais pourquoi « au temps » ? D’où ça vient ? Aussi surprenant que cela puisse paraître, cette expression trouve son origine dans le jargon militaire. Vous avez tous déjà vu les défilés miliaires où tous les soldats marchaient au pas, exactement au même rythme. Tout un entraînement ! Lorsque l’un d’entre eux est en décalage, on dit qu’il n’est pas « au temps ». Tout le peloton doit alors recommencer, d’où la volonté de reconnaître son erreur et de concéder que l’on va reconsidérer les choses depuis leur début. 

  • « Mariage pluvieux, mariage heureux » ou « mariage plus vieux, mariage heureux » ?

Dès qu’un mariage est célébré sous la pluie, on a presque toujours le droit à l’un des invités qui, en lot de consolation, ressort l’expression « Mariage pluvieux, mariage heureux ». L’expression complète serait même « Mariage pluvieux, mariage heureux, venteux, malheureux ». Pas illogique lorsque l’on sait que la pluie symbolise la fertilité, l’abondance, la prospérité, la richesse et l’amour. Sauf que tout le monde n’est pas d’accord ! Pour Le Larousse par exemple, cette expression, qui date du XIXe siècle, ne fait en réalité pas référence au temps (météo) mais au temps (durée) : « Mariage plus vieux, mariage heureux ». Plus un couple est ensemble depuis longtemps, plus il a de chance de durer. C’est donc le temps, l’expérience, l’habitude, ou encore la sagesse qui ferait la réussite d’un couple, et non la météo. Bref, chacun a le choix de l’interpréter à sa façon, même si l’Académie française opte pour la première signification et assure que la deuxième est une déformation de la première.

Crédit Photo : Marion Poulle
  • On ne dit pas « le retour de l’enfant prodige », mais « le retour de l’enfant prodigue »

Du latin « prodigium », qui signifie « événement prodigieux, chose merveilleuse », « prodige » s’utilise aujourd’hui pour qualifier quelqu’un ou quelque chose d’extraordinaire et de talentueux, de façon surnaturelle, d’où l’utilisation de l’expression « l’enfant prodige ». Sauf qu’à l’origine, l’expression « le retour de l’enfant prodigue » est bien loin du prodigieux puisqu’on appelle généralement l’enfant prodigue celui qui revient au domicile des parents après avoir dilapidé son bien en dépenses futiles et excessives. D’où cela vient-il ? « Prodigue » est une allusion à une parabole de Jésus dans l’Evangile (Luc, XV, 11-32), laquelle raconte l’histoire du cadet d’une fratrie qui a dilapidé toute la fortune que lui a laissé son père en seulement quelques jours et qui revient chez ce dernier, totalement ruiné. Au lieu de lui faire la morale ou de le rejeter, le père l’accueille à bras ouverts et le couvre de cadeaux, heureux de le voir revenir. On dit donc « l’enfant prodige » ou « le retour de l’enfant prodigue ».

  • « être dans l’œil du cyclone » ne signifie pas traverser une mauvaise passe, au contraire

On dit souvent qu’untel « est dans l’œil du cyclone » pour dire qu’il traverse une mauvaise passe, qu’il est en pleine tourmente. Sauf qu’il s’agit là d’un contresens total. L’œil du cyclone c’est, au contraire, cette zone de calme au milieu de la tempête, un espace paisible situé en son centre où le vent est faible et le ciel relativement dégagé. Si une personne se trouve dans l’œil du cyclone, cela signifie en réalité qu’elle bénéficie d’un petit instant de répit, d’accalmie. C’est donc plutôt positif !

  • On ne dit pas « descendre en flèche »

On utilise souvent cette expression pour dire que quelqu’un a été sévèrement critiqué ou calomnié. Or, selon l’Académie française, cette expression est erronée. Il s’agit en réalité d’une combinaison des expressions « en flèche » et « descendre en flammes » : pour que cela soit correct, il faudrait donc utiliser la deuxième expression, qui tient son origine des combats aériens, lorsqu’un avion en abattait un autre. 

Il existe également plusieurs pléonasmes (quand deux mots veulent dire la même chose) :

  • on ne dit pas « au jour d’aujourd’hui », mais « aujourd’hui »
  • on ne dit pas « monter en haut », mais « monter »
  • on ne dit pas « descendre en bas », mais « descendre »
  • on ne dit pas « sortir dehors », mais « sortir » ou « aller dehors » 
  • on ne dit pas « moi, personnellement », mais soit « moi », soit « personnellement »
  • on ne dit pas « incessamment sous peu », mais « incessamment » ou « sous peu »
  • on ne dit pas « sur un même pied d’égalité », mais « sur un pied d’égalité » ou « sur un même pied »
  • on ne dit pas « il y a deux alternatives », mais « il y a une alternative ». (Une alternative, ce sont déjà deux solutions. Ainsi, dire qu’il « y a deux alternatives » voudrait en réalité signifier qu’il y a 4 solutions).

On vient de vous donner quelques exemples mais, vous l’aurez compris, les dérives sont nombreuses concernant la langue française et ses expressions…

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